Pétrole dans les organismes

De nombreux travaux scientifiques sur le devenir du pétrole dans les organismes ont été réalisés.
Ils ont démontré que certains hydrocarbures peuvent provoquer des proliférations cellulaires anormales (tumeurs) lorsqu’ils sont injectés ou implantés dans les chairs. Des mises en contact répétées avec ces produits peuvent provoquer des lésions ou des nécroses, en particulier des yeux et du nez, ainsi que des altérations chromosomiques au niveau des cellules reproductrices. Après certaines marées noires, il a été mis en évidence divers effets mutagènes, cancérigènes, pathologiques ou métaboliques à terme.

Mais le lien direct entre la pollution et ces effets n’a jamais été clairement démontré, de multiples autres facteurs d’origine naturelle ou humaine interférant dans la vie des espèces. À la grande colère des victimes, cette situation aboutit généralement à un rejet des demandes de dommages à long terme sur les écosystèmes, en considérant les argumentations qui les fondent comme de simples spéculations sans valeur probante.

L’altération du goût et de l’odeur des chairs de certaines espèces est par contre parfaitement observable et mesurable. Ce « goût de pétrole » s’établit en quelques heures à quelques jours dans une eau contaminée. Il disparaît ensuite en quelques semaines lorsque cesse la contamination. Il revêt une importance particulière pour les espèces faisant l’objet d’une activité de pêche ou d’aquaculture, en les rendant temporairement impropres à la mise sur le marché. Cela impose des décisions rapides d’interdiction de pêche ou de commercialisation.

suivi de la contamination des moules
Suivi de la contamination des moules lors
des pollutions de l’Erika et du Prestige
(Source : Ifremer)


Ces interdictions, fondées sur des analyses de chair ou des tests organoleptiques souffrent rarement de contestation. Il en va tout autrement des décisions de réouverture des activités. Le consommateur imaginera difficilement qu’on puisse lui proposer un poisson ou un crustacé qui a pris un goût de pétrole, avec la simple assurance de la disparition de ce goût. Ne vaudrait-il pas mieux tout détruire, en application du principe de précaution ?

 

Les mécanismes écotoxicologiques en cause ne sont pas différents de ceux qui interviennent pour les espèces non exploitées. Mais le problème purement écotoxicologique jouxte des problèmes économiques et de santé publique. Il est hors de question de faire prendre le moindre risque aux consommateurs. Il faut les rassurer sur la qualité de produits qui ont souvent été annoncés comme irrémédiablement contaminés les jours suivant la catastrophe. Et il faut aussi éviter de causer, par des décisions excessives, des dommages additionnels à des professions déjà lourdement affectées.

En pratique, comme il est matériellement impossible de savoir quel poisson ou quel crustacé sauvage a été contaminé, la pêche est de nouveau autorisée à partir du moment où des analyses chimiques ou des tests organoleptiques répétés assurent qu’il n’y a plus de contamination sur l’ensemble de la zone en cause. Pour les productions aquacoles, des destructions de stocks avant réouverture des ventes sont parfois mises en oeuvre, afin de garantir aux consommateurs des produits irréprochables.

Analyses et tests organoleptiques

Chaque pays gère les interdictions de mise sur le marché des produits aquacoles
selon ses propres règles, assurant au consommateur le niveau de protection
qu’il est en droit d’attendre, sans pour autant interdire au-delà du raisonnable
ou détruire des stocks à l’excès.Ce n’est facile ni à établir, ni à mettre en oeuvre : les résultats de tests et analyses pratiqués sur des échantillons peuvent être interprétés de manière très différente selon la nature et la sévérité des critères qu’on choisira de retenir.Dans la pollution de l’Agean Sea en Galice, les autorités espagnoles ont choisi les tests organoleptiques comme référence, avec destruction de produits aquacoles contaminés. Dans celle de l’Erika en France, l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) a préféré utiliser des analyses de teneur en « paquet » de 16 hydrocarbures aromatiques polycycliques connus comme potentiellement cancérigènes, sans destruction de stock (sauf pour des filières mytilicoles engluées).


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