Pétrole dans le milieu

Ce qui s’évapore au cours des premières heures et ce qui est photo-oxydé ou biodégradé avant et pendant les opérations de nettoyage représente entre 30 et 50 % d’un déversement de pétrole brut.

Les opérations de confinement et de récupération en mer et sur le littoral ne permettent de récupérer que 20 % du reste, 40 % au mieux.

Il subsiste donc, dans le milieu, au moins un tiers et parfois plus de la moitié du volume du polluant déversé, sous trois formes : dissoute pour la part minime des composants solubles, décantée au fond pour les composés lourds et adsorbée sur les sédiments, et à l’état de particules en suspension pour le reste.

Ce pétrole qui manque dans les décomptes de la lutte ne se présente pas, sous la forme d’une grande nappe épaisse et continue, dérivant sous la surface et menaçant tel ou tel littoral. Les nappes d’origine sont en effet éparpillées par la houle, le vent et les courants.

Persistance de fioul lourd sur
le littoral


Une des grandes craintes de l’après-Erika était la persistance sur le littoral du fioul non ramassé : le produit étant réputé très peu biodégradable, il y avait un risque de le retrouver en l’état des années après. Le sujet a donc été intégré dans le programme de suivi des conséquences
écologiques et écotoxicologiques de cette marée noire (www.suivi-erika.info).

Les études ont mis en évidence, 3 ans après le naufrage, la persistance sur les rochers d’un fioul résiduel sous forme de couches fines, dégradé à 66 % en moyenne, et sous forme de galettes et d’encroûtements, dégradé à 55 % en moyenne, avec des variations sensibles selon les milieux. Dans les intérieurs d’enrochements, à l’abri de la lumière, le fioul restait visqueux, avec une dégradation inférieure à 20 %.

La dégradation du fioul, comme on s’y attendait, a été très faible. Mais il y a eu une photodégradation importante du produit exposé aux rayonnements solaires, plus forte sur les couches fines.

Ce pétrole vieilli interfère sur les espèces et les écosystèmes par simple effet mécanique, comme le feraient des débris d’asphalte d’une route arrachés par une crue et dispersés dans la nature.

En quantités importantes dans le sable d’une plage ou la vase d’un marais, le pétrole vieilli peut modifier les cycles saisonniers d’érosion et d’engraissement des sédiments, provoquant des effets localisés sur la faune.

La fraction dissoute, les gouttelettes adsorbées sur les sédiments, ainsi que les particules en suspension peuvent contenir des proportions encore sensibles de composants aromatiques, d’une toxicité non négligeable. Ce sont surtout elles qui pourraient contaminer à terme des organismes, par dégradation des cellules branchiales et digestives, en particulier chez les animaux filtreurs d’eau ou de sédiment. S’il reste des hydrocarbures en suspension en quantité importante cela peut prolonger des concentrations anormales dans les coquillages interdisant toute collecte.

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Bilan massique

Amoco Cadiz : pétrole léger, évaporation forte
Prestige : fioul lourd, récupérations importantes en mer et fortes dans l’épave



fioul résiduel de l'Erika
Fioul résiduel de l’Erika dans un lit de galets végétalisé

plaque de granit souillees
Plaques de granite souillées pour une étude de persistance des hydrocarbures sur substrat rocheux

La dispersion naturelle et chimique a commencé son oeuvre. Le pétrole, libéré de ses composants évaporables et rapidement photo-oxydables et biodégradables, a été fractionné en galettes, boulettes et souillures dispersées.

Certaines nappes dérivent au large, hors de portée de la récupération en mer. D’autres se sont échouées, ont été plus ou moins recouvertes de sédiment, et ont été oubliées, volontairement ou non, par les opérateurs du nettoyage littoral. Il s’agit alors de pétrole vieilli, semi-solide à solide, majoritairement composé d’asphaltènes, hydrocarbures à longue chaîne, non toxiques.

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Les craintes du public



Les craintes du public concernant le risque d’une contamination à terme des organismes prennent de multiples formes :
• craintes d’altérations du comportement, du métabolisme, de la croissance, des facultés reproductrices des animaux et végétaux qui se sont trouvés en contact avec le pétrole ;
• craintes de bioaccumulation de certains
hydrocarbures, entraînant des effets en cascade dans les chaînes alimentaires, y compris jusqu’au consommateur de produits de la mer ; craintes de développement de tumeurs bénignes ou malignes chez les organismes touchés et leur descendance ;
• craintes d’éventuelles aberrations chromo- somiques susceptibles d’affecter l’intégrité des générations futures ;
• craintes d’impacts à long terme sur la santé des opérateurs ayant participé au nettoyage du littoral et au sauvetage des oiseaux.

Ces craintes doivent être prises en compte par les autorités et faire l’objet d’une information objective en temps réel pendant la crise, puis d’études
approfondies dans le cadre du suivi des impacts.


www.marees-noires.com